jeudi 1 octobre 2015

Le mental-singe illustré


« Si vous ne faites pas confiance en la Vérité, comment pourrez-vous vivre la Vérité ? Vous n'êtes qu'un singe, un vrai babouin ! D'ailleurs, c’est bien pour cela que Dieu a créé autant de singes: pour qu’on ait toujours sous les yeux notre condition de base ! » Yogi Bhajan

Connaissez-vous Kabir? C'est un des plus grands mystiques de l’Inde ; il vécut au 15e siècle, quelques temps avant Gurū Nānak. Simple tisserand, il chantait et enseignait depuis son atelier, à Bénarès. Sa sagesse y attirait des foules considérables, au grand dam des mollahs musulmans et des brahmanes hindous qui considéraient ses hymnes comme de véritables blasphèmes. Plusieurs fois condamné à mort, il s’en échappa à chaque fois : même Mata Ganga, la « Mère Gange », dans lequel il fut jeté enchaîné, refusa de le noyer !

La tradition sikhe donne une grande place à Kabir, et ses chants figurent par centaines dans le Sirī Gurū Granth Sāhib, parfois suivis de commentaires de Gurū Nānak ou Gurū Arjan.

À propos du mental, voici un des images que donne Kabir (SGGS p. 336) : un singe curieux et avide.

ਮਰਕਟ ਮੁਸਟੀ ਅਨਾਜ ਕੀ ਮਨ ਬਉਰਾ ਰੇ ਲੀਨੀ ਹਾਥੁ ਪਸਾਰਿ ॥
markat mustī anāj kī man baorā re līnī hāth pasār.
Le singe glisse sa main, ô mental insensé, et saisit une pleine poignée (de graines).

ਛੂਟਨ ਕੋ ਸਹਸਾ ਪਰਿਆ ਮਨ ਬਉਰਾ ਰੇ ਨਾਚਿਓ ਘਰ ਘਰ ਬਾਰਿ ॥੨॥
chhūtan ko sehsā pariā man baorā re nāchio ghar ghar bār.
Incapable d’échapper à sa curiosité angoissée, ô mental insensé, on le fait bientôt danser de porte en porte, encore et encore.

Cela fait en fait référence à une ruse traditionnelle qu’utilisaient certains peuples d’Afrique et d’Asie pour attraper les singes :


  • Faire en sorte qu’un singe vous observe. 
  • Creuser un trou dans un noix de coco fermement attachée, ou encore dans une termitière ; le trou doit être juste de la taille d’un main de singe
  • Y glisser quelques graines. 
  • Bientôt, un singe curieux y glissera la main pour attraper la nourriture. 
  • Mais sa main pleine est désormais trop grosse pour ressortir du trou, et le singe est piégé.


Aussi incroyable que cela puisse paraître, le singe n’a qu’à lâcher la nourriture pour s’échapper. Mais à cause de sa curiosité maladive (c’est le terme qu’emploie Kabir), de son avidité et de sa gourmandise… il ne le fait pas !

On parle ici du singe-mental (monkey mind en anglais). Car de même, notre mental est pris au piège par Maya, c’est-à-dire tout ce qui est local et temporaire mais auquel on s’identifie néanmoins: sensations, choses, personnes, statuts, opinions, etc. - c’est à moi, c’est le mien, mon ceci, mon cela…  (« mon préssscieux »). Et si le mental est piégé, c’est à cause de sa curiosité (« la différence entre vous et moi : moi je sais et cela m’arrête ; vous, vous savez et vous y allez quand même » Yogi Bhajan), de son avidité et de sa tendance instinctive à s’emparer des choses et de prétendre qu’elles lui appartiennent. En somme, il suffirait au mental de lâcher prise sur ce qu’il pense posséder pour s’échapper. Ou mieux encore, il lui suffirait d’apprendre à ne s’emparer de rien, et à plutôt se tourner vers la conscience supérieure. Mais si l’on n’éduque pas son mental à cela, on est comme le singe de Kabir: un fil à la patte, réduit à se comporter éternellement comme un singe de foire pour quelques récompenses.

En bonus, une formidable petite vidéo qui illustre à merveille le propos de Kabir: comment trouver de l’eau dans le désert (rassurez-vous, rien de cruel, le singe s’en sort bien à la fin).


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